REDIGER UN BAIL COMMERCIAL

La rédaction d’un bail commercial est complexe et délicate.

Nombre de clauses doivent y figurer, et plusieurs documents doivent y être annexés.

Le non-respect de ces obligations peut entraîner la nullité du bail, ou une réduction du montant du loyer, sans compter que toute imprécision, ambiguïté ou omission pourra donner lieu à des difficultés d’interprétation pouvant entraîner de longs contentieux.

Seront évoqués ci-dessous, sans prétendre à l’exhaustivité, les principes directeurs concernant un noyau dur de clauses indispensables devant figurer dans un bail commercial.

L’objet du bail commercial

Le local, objet du bail commercial, doit être utilisé pour l’exploitation d’un fonds commercial, industriel ou artisanal. Si tel n’est pas le cas, un changement d’affectation de local sera nécessaire et devra faire préalablement l’objet d’une démarche administrative. Le bail commercial s’applique également aux commerçants franchisés. En revanche, les locataires-gérants sont exclus du statut car ils ne sont pas propriétaires du fonds de commerce.

Une fois la nature du local déterminée, il est indispensable de définir scrupuleusement l’activité du Preneur qui y sera autorisée. En effet, le locataire ne peut exercer dans les lieux loués que la ou les activités expressément stipulées au bail commercial.

En tant que Bailleur, il est important d’exclure la clause « tous commerces » car celle-ci permet à son Preneur d’exercer toute activité dans son local sans demander l’accord préalable de son Bailleur, l’empêchant notamment de bénéficier des avantages que lui offre le régime de la déspécialisation.

La durée du bail commercial : bail “3/6/9”

La durée d’un bail commercial ne peut être inférieure à 9 ans, en conformité de l’article L. 145-4 alinéa 1 du Code de commerce. Cette durée est d’ordre public, il est impossible d’y déroger. L’article L.145-15 du Code de commerce dispose que les clauses qui ont pour effet de faire échec à la durée minimale prévue sont réputées non écrites, de telle manière que le bail sera considéré comme être conclu pour 9 ans.

Les parties peuvent fixer librement la durée de leur bail si celle-ci est supérieure à 9 ans ; la seule limitée étant qu’elle ne peut être fixée pour une durée indéterminée. Cependant, un tel choix n’est pas sans conséquence pour les parties :

  • le loyer renouvelé se trouvera déplafonné ;
  • le bail devra faire l’objet d’une publicité foncière s’il est consenti pour plus de 12 ans ;
  • le bail sera en principe renouvelé pour 9 ans, sauf accord contraire des parties ;
  • sur l’exercice du congé du locataire qui entend mettre un terme à son bail.

A son terme, le bail commercial ne prend pas fin. Faute de congé de la part du bailleur ou du preneur, celui-ci se poursuit par tacite prolongation (Dans ce cas, il est résiliable moyennant un  préavis de 6 mois et est un grand facteur d’insécurité juridique pour le preneur). Il peut également être renouvelé, auquel cas un nouvel acte est rédigé. Cela peut être un simple avenant de renouvellement, ou encore une refonte intégrale du bail, selon  la volonté des parties.

Dans le cadre des résidences de tourisme, les baux passés entre les propriétaires et les exploitants sont d’une durée de 9 ans minimum, sans possibilité de résiliation à l’expiration d’une période triennale.

Exceptions : Les baux de courte durée

Dans certains cas, il est possible de conclure un bail d’une durée inférieure à 9 ans. Il s’agit soit d’un bail de courte durée dit « bail dérogatoire », soit d’une convention d’occupation précaire qui est autorisée qu’à raison de circonstances exceptionnelles ou particulières.

Fixation du loyer initial du bail commercial et droit d’entrée

Le loyer d’un bail commercial ainsi que ses modalités de paiement sont fixés par les parties. Il peut ainsi être fixe, variable avec un minimum garanti (appliqué essentiellement dans le cadre d’une boutique au sein d’une galerie marchande).

Le bailleur peut réclamer à son locataire, en supplément du loyer, le versement d’un droit d’entrée, appelé communément pas-de-porte, à son entrée dans les lieux si les locaux sont vacants.

La clause ayant trait au pas-de-porte doit être rédigé de manière précise car sa qualification peut avoir une incidence d’un point de vue fiscal, selon qu’il est qualifié de supplément de loyer ou d’indemnité compensatrice d’avantage commerciaux dans le bail commercial.

Dans la première hypothèse, il produit intérêts. De plus, si le locataire l’a versé intégralement lors de son entrée dans les lieux, il peut, en cas de résiliation, donner lieu à un remboursement au prorata du temps d’occupation des locaux restant à courir.

Dans la seconde hypothèse, il reste acquis au propriétaire en cas de résiliation du bail.

Révision du loyer en cours de bail

La révision du loyer en cours de bail est possible selon la révision triennale légale, à la demande du bailleur ou du locataire au bout de 3 ans minimum, ou selon une clause d’échelle mobile, laquelle permet de voir le loyer initial révisé automatiquement, sans intervention du bailleur, selon la périodicité définie par les parties dans le bail par le jeu de variation d’indices.

Dépôt de garantie du bail commercial

Il est d’usage que le bailleur sollicite le versement d’un dépôt de garantie et la garantie de tiers (personne physique, personne morale, banque) au moment de la conclusion du bail commercial, pour se prémunir contre d’éventuels manquements de son locataire à ses obligations contractuelles (loyers/charges impayés, non entretien ou dégradation des lieux loués, non-exécution des réparations locatives…). Cette somme est restituée en fin de bail au locataire après entière exécution de ses obligations contractuelles, déduction faite des sommes éventuellement dues.

Si le loyer est payable trimestriellement et d’avance (terme à échoir), le montant du dépôt de garantie doit être limité à un trimestre de loyer HTHC, car au-delà de ce seuil, les sommes porteront intérêts au profit du locataire (L. 145-40 C. com).

Si le loyer est payable trimestriellement à terme échu, le dépôt de garantie doit correspondre à deux trimestres de loyer HTHC. Au-delà, il produira intérêts au profit du locataire, au taux pratiqué par la Banque de France pour les avances sur titre.

La répartition des charges, impôts, taxes et redevances du bail commercial

Les charges liées à la jouissance des locaux sont librement réparties entre les parties. En pratique, le bailleur refacture toutes les charges à son locataire, à l’exception de celles qui doivent être légalement supportées par le bailleur comme les grosses réparations, les travaux liés à la vétusté, les impôts tels que la contribution économique territoriale (CET).

La répartition des charges, impôts, taxes et redevances entre le locataire et le bailleur doit obligatoirement figurer dans le contrat de bail, depuis la loi Pinel du 18 juin 2014.

Le sort des travaux effectués par le locataire en fin de bail

Au cours de son bail commercial, le locataire peut être tenté de procéder à des travaux, dépassant de simples agencements, pour les besoins de son activité. Il peut s’agir de constructions nouvelles ou d’améliorations.

Il est important de prévoir le sort de ces travaux en fin de bail en insérant une clause dite « clause d’accession » permettant au bailleur de fixer les conditions de transfert de propriété à son bénéfice des aménagements et constructions réalisés par le locataire et à ses frais dans les lieux loués, souvent sans l’indemniser. Pour le locataire, une telle clause peut présenter un avantage certain dès lors qu’il n’aura alors pas à remettre les lieux loués en leur état primitif.

Documents à annexer au bail commercial

Les annexes obligatoires à joindre au bail :

  • État des risques et pollutions
  • Diagnostic de performance énergétique (DPE) : durée de validité 10 ans
  • Diagnostic amiante : durée illimitée si constat négatif
  • État des lieux d’entrée (et de sortie) soit de façon contradictoire et à l’amiable par les parties soit par un huissier de justice, à l’initiative de l’une des deux parties, à frais partagés par moitié. A défaut, le locataire n’est pas présumé avoir reçu les locaux en bon état de réparations locatives et donc le bailleur s’expose à des risques.